Grand pourvoyeur de main-d’œuvre, le secteur de la logistique contribue significativement au maintien du niveau d’emploi en France. Toutefois, cette réalité s’accompagne d’un revers préoccupant : jusqu’à 50 % des contrats sont précaires (CDD et intérim), les rythmes de travail sont éprouvants, et le management par algorithmes déshumanise les relations professionnelles. Cette contradiction est parfaitement illustrée par l’exemple de l’entrepôt Amazon LIL1, situé à Lauwin-Planque dans le Nord.
Dans cette installation imposante de 95 000 mètres carrés – l’équivalent de treize terrains de football – pas moins de vingt millions d’articles transitent à travers d’interminables rayonnages. Une enceinte Bluetooth, une ampoule LED, un DVD Star Trek, une protection de téléphone rose, des filtres à café… la diversité des produits surprend au premier abord.
“À première impression, vous pourriez penser que nos produits sont rangés de façon aléatoire. Mais tout est calculé au millimètre près. Nous stockons là où l’espace est disponible,” explique Jean Porcher, directeur du centre de distribution LIL1 d’Amazon. Il précise qu’en réalité, placer côte à côte des articles sans rapport apparent s’avère plus efficace, permettant aux préparateurs de commandes, guidés par leurs lecteurs de codes-barres, de les identifier plus facilement.
Dans ce centre employant 2 600 salariés – presque le double de la population de Lauwin-Planque – rien n’échappe au contrôle des algorithmes. “Grâce à l’intelligence artificielle, nous optimisons les flux pour assurer que chaque employé ait constamment une tâche à accomplir,” ajoute Jean Porcher.
Du travail certes, mais dans quelles conditions ? “Le secteur logistique recrute des jeunes en recherche d’emploi en leur promettant une activité physique, environ sept kilomètres de marche quotidienne. Le résultat ? Des employés de moins de 30 ans qui, s’ils ne démissionnent pas avant, finissent par être licenciés pour inaptitude après une dizaine d’années, souffrant de lombalgies, de problèmes dorsaux ou de tendinites aux épaules,” déplore Khalid Oughzif.