Déficit : Bruno Le Maire règle ses comptes

L’ambiance était électrique à l’Assemblée nationale ce jeudi. Auditionné pendant un marathon de quatre heures, l’ancien ministre de l’Economie Bruno Le Maire a mené un long réquisitoire contre les députés de l’Assemblée nationale. « Avec la censure, vous avez à nouveau fait dérailler la France », a taclé l’ancien locataire de Bercy devant des élus remontés.

« Devant qui est-ce que je prends la parole ce matin ? Je parle devant des parlementaires qui se précipitent au 20 heures pour annoncer que les retraites seront bien revalorisées au 1er janvier. Et vous dites vouloir réduire le poids de la dette ? Hypocrisie » .

“Si j’avais un regret c’est plutôt sur le fait que sur la dépense nous aurions pu aller plus loin dans les économies”, conclut @BrunoLeMaire . #DirectAN pic.twitter.com/oXJcNqUjDc— LCP (@LCP) December 12, 2024

Convoqué par la commission d’enquête parlementaire pilotée par le député (LFI) Eric Coquerel, Bruno Le Maire est venu s’expliquer sur la dérive des finances publiques des dernières années. Juste avant cette série d’auditions, le président de la commission des finances a expliqué àLa Tribune il y a quelques jours qu’il voulait d’abord commencer par interroger les pontes de l’administration à Bercy et à la Sécurité sociale avant de passer sur le grill les ministres.

« Ces erreurs [de prévisions] viennent d’un aveuglement idéologique. Il y a une responsabilité des politiques à peindre un tableau optimiste », a jugé l’élu de Seine-Saint-Denis.

« Une forme de mépris et de condescendance»

Dans son allocution préliminaire, Bruno Le Maire a commencé par un déluge de critiques sur les débats budgétaires de l’automne. « Le débat sur le budget 2025 et la motion de censure du gouvernement ont fait tomber les masques […]. Cette assemblée taxe, dépense, censure. Elle vote toutes les dépenses nouvelles – manière un peu baroque de redresser les comptes », s’est exclamé l’enseignant en économie, en Suisse .

Faisant référence au rejet du budget de la Sécurité sociale et la motion de censure, l’ancien député de Normandie a lancé des piques sur le Nouveau Front Populaire (NFP). « On fait croire que seuls les riches seront taxés, mais on prévoit une augmentation de 1 point des charges sur tous les salaires, même les salaires des plus modestes ». L’extrême droite n’a pas été épargnée par Bruno Le Maire.

« Avec la complicité du RN, qui lui préfère les artifices : une pincée de lutte contre la fraude, un poil de migrants en moins, et hop ! Le déficit a disparu ! Comme par magie et sans effort » . En face, les députés ont pointé « le manque d’humilité » de l’ancien ministre. « L’offensive est d’ailleurs une forme de diversion », a vilipendé le député (Union des droites) Eric Ciotti dénonçant, « une forme de mépris et de condescendance».

Audition de Bruno Le Maire : “Un minimum d’humilité aurait été bienvenu face à l’état de dégradation des comptes et de la situation financière dont, en tant que ministre ces sept dernières années, vous êtes bien sûr le responsable”, déclare @EstelleMercier2 . #DirectAN pic.twitter.com/IevsV4GSQi— LCP (@LCP) December 12, 2024

« Graves erreurs sur les prévisions »

Sur les prévisions de recettes, Bruno Le Maire a évoqué de « graves erreurs ». « En 2023 et 2024, nous avons du faire face à une perte brutale de recettes fiscales à hauteur de 42 milliards d’euros ». Comment expliquer un tel trou fiscal ? « Il y a eu une mauvaise évaluation des recettes […]. Les modèles ont failli », a concédé le haut fonctionnaire.

« Le principe d’un point de croissance est égal à un point de recettes est-il encore bon ? Au regard des aberrations des quatre dernières années, on peut se poser la question » .

S’agissant des points critiques évoqués par les députés, les recettes de l’impôt sur les sociétés ont été la source de nombreuses questions. Eric Coquerel a interrogé Bruno Le Maire sur les effets des baisses d’impôts sur les entreprises qui « n’ont pas apporté de croissance supplémentaire et donc de recettes en plus » . De son côté, Bruno Le Maire a répondu que « nous avons baissé le taux de l’IS à 25% [contre 33% en 2017], les recettes sont passées de 31 milliards d’euros en 2015 à 57 milliards en 2023 ».

Pendant la plupart de ses interventions, Bruno Le Maire a défendu ardemment la politique de l’offre menée depuis 2017. « Si on veut libérer les forces dans notre pays, il faut réduire les taxes », a-t-il insisté. Accusé d’avoir fait des cadeaux aux plus riches en baissant la fiscalité sur le capital, l’ex-ministre de Bercy a rappelé sa position favorable à une taxation minimale des plus riches à l’échelle de la planète.

« Je me suis battu sur la taxation mondiale des plus riches et la taxe minimum mondiale sur les sociétés ». Dubitative sur cette politique économique, Christine Pirès Beaune député (PS) spécialiste des finances publiques a sèchement répondu : « Le ruissellement promis pour tous n’a pas eu lieu. En revanche, le ruissellement a eu lieu pour un petit nombre » .

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